Il y a peu de temps, notre PR (comme le codifierait le Général Rondot) a instauré la lecture par les lycéens, à la rentrée, de la lettre de Guy Môquet, ce jeune résistant condamné à mort.
On peut s'interroger sur l'objectif recherché par une telle lecture, mais au-delà de ce débat, l'instauration de la lecture de cette lettre m'a rappelé une autre lettre.
Elle aussi, elle avait été écrite par un enfant. Enfin deux. Juste avant de mourir.
Bon, ils n'étaient pas français, et ils étaient noirs. Et ils ne sont pas morts victimes de la guerre, mais de l'égoïsme général du monde dans lequel nous vivons, qui ne vaut guère mieux.
Sans plus de commentaires (on s'en passera ici > chacun ressentira les deux lettres à sa manière), voici les textes de ces deux lettres, qui, finalement, ont plus d'un point commun.
Le premier jeune s'adresse à ses parents avec amour, respect et espoir. Les seconds s'adressent aux "parents forcés" de leur continent, les Européens, également avec respect, amour, et espoir. Avant de mourir.
Pauvres enfants.
La lettre du jeune résistant Guy Môquet, fusillé à 17 ans en 1941
"Ma petite maman chérie,
mon tout petit frère adoré,
mon petit papa aimé,
Je vais mourir ! Ce que je vous demande, toi, en particulier ma petite maman, c'est d'être courageuse. Je le suis et je veux l'être autant que ceux qui sont passés avant moi. Certes, j'aurais voulu vivre. Mais ce que je souhaite de tout mon cœur, c'est que ma mort serve à quelque chose. Je n'ai pas eu le temps d'embrasser Jean. J'ai embrassé mes deux frères Roger et Rino. Quant au véritable je ne peux le faire hélas ! J'espère que toutes mes affaires te seront renvoyées elles pourront servir à Serge, qui je l'escompte sera fier de les porter un jour. A toi petit papa, si je t'ai fait ainsi qu'à ma petite maman, bien des peines, je te salue une dernière fois. Sache que j'ai fait de mon mieux pour suivre la voie que tu m'as tracée.
Un dernier adieu à tous mes amis, à mon frère que j'aime beaucoup. Qu'il étudie bien pour être plus tard un homme.
17 ans 1/2, ma vie a été courte, je n'ai aucun regret, si ce n'est de vous quitter tous. Je vais mourir avec Tintin, Michels. Maman, ce que je te demande, ce que je veux que tu me promettes, c'est d'être courageuse et de surmonter ta peine.
Je ne peux en mettre davantage. Je vous quitte tous, toutes, toi maman, Serge, papa, en vous embrassant de tout mon cœur d'enfant. Courage !
Votre Guy qui vous aime.
Guy
Dernières pensées : Vous tous qui restez, soyez dignes de nous, les 27 qui allons mourir !"
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La lettre des jeunes émigrants Yaguine Koita et Fodé Tounkara, asphyxiés dans le train d'aterrissage d'un A330 (Guinée - Belgique) à 14 et 15 ans en 1999
"Excellences, Messieurs les membres et responsables d'Europe,
Nous avons l'honorable plaisir et la grande confiance de vous écrire
cette lettre pour vous parler de l'objectif de notre voyage et de la
souffrance de nous, les enfants et jeunes d'Afrique.
Mais tout d'abord, nous vous présentons les salutations les plus
délicieuses, adorables et respectées dans la vie. A cet effet, soyez
notre appui et notre aide. Vous êtes pour nous, en Afrique, ceux à qui
il faut demander au secours. Nous vous en supplions, pour l'amour de
votre continent, pour le sentiment que vous avez envers votre peuple et
surtout pour l'affinité et l'amour que vous avez pour vos enfants que
vous aimez pour la vie. En plus, pour l'amour et la timidité de notre
créateur Dieu le tout-puissant qui vous a donné toutes les bonnes
expériences, richesses et pouvoirs de bien construire et bien organiser
votre continent à devenir le plus beau et admirable parmi les autres.
Messieurs les membres et responsables d'Europe, c'est de votre
solidarité et votre gentillesse que nous vous crions au secours en
Afrique. Aidez-nous, nous souffrons énormément en Afrique, nous avons
des problèmes et quelques manques au niveau des droits de l'enfant.
Au niveau des problèmes, nous avons la guerre, la maladie, le manque
de nourriture, etc. Quant aux droits de l'enfant, c'est en Afrique, et
surtout en Guinée nous avons trop d'écoles mais un grand manque
d'éducation et d'enseignement. Sauf dans les écoles privées où l'on
peut avoir une bonne éducation et un bon enseignement, mais il faut une
forte somme d'argent. Or, nos parents sont pauvres et il leur faut nous
nourrir. Ensuite, nous n'avons pas non plus d'écoles sportives où nous
pourrions pratiquer le football, le basket ou le tennis.
C'est pourquoi, nous, les enfants et jeunes Africains, vous
demandons de faire une grande organisation efficace pour l'Afrique pour
nous permettre de progresser.
Donc, si vous voyez que nous nous sacrifions et exposons notre vie,
c'est parce qu'on souffre trop en Afrique et qu'on a besoin de vous
pour lutter contre la pauvreté et pour mettre fin à la guerre en
Afrique. Néanmoins, nous voulons étudier, et nous vous demandons de
nous aider à étudier pour être comme vous en Afrique.
Enfin, nous vous supplions de nous excuser très très fort d'oser
vous écrire cette lettre en tant que Vous, les grands personnages à qui
nous devons beaucoup de respect. Et n'oubliez pas que c'est à vous que
nous devons nous plaindre de la faiblesse de notre force en Afrique.
Ecrit par deux enfants guinéens, Yaguine Koita et Fodé Tounkara."